Germe, Léone et Luce. Les chères femmes éparpillées par le temps qui passe et fait se succéder les générations sont enfin invoquées ensemble. Elle était un peu chacune d'elles et tout à fait une autre. Chaque prénom de ses aïeules contenait une infime partie de ce qui la définissait. L'épi en devenir, la force d'une lionne et la lumière intérieure. Son arrière grand-mère avait, la première, contemplé les vallons qui accueilleraient plus tard sa bru dont le métier de bergère lui ferait arpenter dans tous les sens ces pentes tant aimées. Quant à sa petite fille, on ne saurait jamais vraiment si elle avait fui ces collines d'ennui profond ou si elle avait simplement suivi «  ce voyou des alentours » qui serait le père de Elle.

Elle, bien sur, je vais la sublimer afin que vous puissiez, fascinés suivre son destin.

Le dessin que nous propose Philippe m'aide en ce sens ….

Imaginez un peu.

Aujourd'hui, la connexion internet plus que limitée m'a fait découvrir l'image peu à peu … si bien que je n'ai pas vu immédiatement se développer la forêt, sa biche ni son ruisseau … j'y reviendrai plus tard … Ce que j'ai vu lentement apparaître à mon écran, c'est la longue et fine chevelure blonde. Délicate. Tissée et lissée à la fois. Vraiment Philippe, je te félicite pour le choix de cet ocre doux, si rare ...

Dès son plus jeune age, Elle s'était vue en exact miroir dans le regard de ses frères au milieu desquels elle avait été élevée comme un garçon parmi les autres. Cheveux coupés tous les mois. Courts.

Laisser pousser ses cheveux deviendrait son premier acte de libération. Affirmer sa différence et chercher une appartenance.

En attendant, les bois, les cabanes de ses frères, le froid de l'hiver désespérant des contrées loin de son pays pré-natal avaient un peu, en leur temps, joués leur rôle d’ersatz  mais il n'existait vraiment dans son cœur d'enfant que les forêts de Xaintrie, bien plus hautes, bien plus belles, bien plus odorantes et dont le vague souvenir in utéro semblait l'envelopper parfois mais qu' Elle ne connaissait pas encore et qu'elle découvrirait bien plus tard dans sa vie.

Cheveux coupés court, genoux écorchés, regard clair et perdu ... Elle voulait comprendre le monde qui l'entourait et n'y parvenait pas.

L'histoire d'un exil. Croyant bien faire, ses parents étaient venus s’agglutiner près d'une grande ville pour y assurer l'avenir de leurs enfants, tant leur campagne originelle leur semblait impropre à y parvenir. Comme tant d'autres …

Et peu de sorcellerie s'épanouirait en Elle pendant toutes les années d'enfance … encore que … en y regardant de plus près, on se demande aujourd'hui comment les professeurs à l'école auraient bien pu faire entrer un peu de savoir dans cette tête si étourdie, si rêveuse, obstinément tournée vers la fenêtre ? Mais que voulez vous, je vous raconte là l'histoire d'une sorcière. En ces histoire là réside toujours un peu de place à la magie …

Un bel air de guitare vient s'improviser près de moi sous les doigts d'un artiste qui m'a rejointe au cantou… La biche apparaît alors derrière l'arbre et, timide, semble venir écouter la mélodie … elle témoigne de l'exil de Elle. Où était passée pendant toutes ces années la petite fille sauvage qu'on lui avait promis comme compagne de jeux ?

La biche, seule venait s'abreuver au ruisseau et l'enfant, absente, partout absente aurait bien du mal à trouver sa place un jour … Pétrie de nostalgie, souvenir du pays perdu, la musique relie désormais la biche et l'enfant dans des jeux de regards à travers les branches et les troncs d'arbres du dessin.

• • filR

    Mercredi 1er Avril 2020 à 12:59
    

    "Toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé serait purement fortuite"… ;)
    
    J'aime bien ta première vision :)